Destins brisés, talents gâchés : ces joueurs, ont-ils vraiment tout perdu ? 

Episode 2/3 – Fabio Fognini : la Commedia dell’arte

Certains talents tennistiques sont une évidence. Leur jeu splendide ne peut que les conduire au succès. Cependant, comme nous l’avons évoqué précédemment pour Nick Kyrgios, leur tempérament ou leurs failles ne leur permettront jamais d’obtenir les résultats escomptés. Dans le cas de l’Italien Fabio Fognini, c’est bien le tempérament qui est en cause … Âmes prudes et sensibles, attention, ça va secouer !

Les Italiens peuvent parfois être caricaturés, notamment vis-à-vis de leur communication, associée à une gestuelle parfois exubérante. Fabio Fognini joue la carte de la caricature à fond ! Son jeu est pourtant splendide et élégant. Il peut d’ailleurs se targuer de nombreux très bons résultats et d’un palmarès fourni. 10 finales dans des tournois ATP et pas moins de 9 titres avec 7 ATP 250, 1 ATP 500 à Hambourg et, le plus beau titre de sa carrière, le Masters 1000 de Monte-Carlo en 2019. Les tennismen affichant un tel bilan ne sont pas légion et pourtant…

La liste des succès de Fabio Fognini pourrait, et surtout devrait, être bien plus conséquente. Mais comme nous l’avions évoqué en ce qui concerne Nick Kyrgios, le joueur Italien a été trahi par son mental, et en particulier par ses nerfs. Dès ses débuts sur le circuit professionnel en 2004, il se fait remarquer par un tempérament fougueux, colérique et contestataire. Le piège dans lequel il tombe fréquemment est la colère. Ainsi, lors de la finale du tournoi de Hambourg en 2015, il a un violent échange avec Rafael Nadal. L’Italien, plie son coude, serre son pouce contre ses doigts et parle en agitant cette main. Il joue ainsi parfaitement la caricature de l’Italien, évoquée quelques lignes plus haut. Il reproche à Rafael Nadal de parler avant de servir et l’invective au changement de côté. De cette manière, il installe la tension dans la rencontre et s’en sert tout au long de la partie.

Parmi les nombreuses altercations déclenchées par Fabio Fognini, il y a des provocations, comme lors de la rencontre de Coupe Davis entre Italie et France en 2018. Fognini et Jérémy Chardy se frôlent lors du changement de côté. Il n’en faut pas plus pour que Fabio s’énerve et envoie comme à son habitude, une salve d’insultes que nous ne préférons pas traduire. Toujours face à Chardy en 2018 à Indian Wells, frustré et impatient, il s’en prend au Français. Il se moque même du niveau de son adversaire et de son classement, le traitant « d’éternel 100^ème mondial », comportement encore une fois intolérable… Il lui arrive même de perdre volontairement un match. En 2013, à Cincinnati, il commet 2 fautes de pied successives, dont une sur balle de match, et ce, afin de perdre le match.

Dans la batterie d’incartade pratiquée par Fognini, il y a la contestation de points et des discussions sans fin avec les arbitres. Ainsi, il a réussi, ce qui est assez unique, à ce que l’arbitre expérimenté Carlos Bernardes, refuse de lui serrer la main à la fin d’un match. Vaincu par Lucas Pouille, Fabio avait commis de multiples écarts de conduite lors de la rencontre, ce qui avait exaspéré cet arbitre que nous connaissons bien. Au paroxysme des mauvais comportements vis-à-vis des arbitres, on trouve une exaction unique. Lors des ATP Finals en double à Londres en 2015, Fognini baisse les chaussettes de l’arbitre lors du changement de côté !

Fabio Fognini est un talent gâché certain. Malgré un excellent niveau de tennis, qui lui a permis d’atteindre le 9^ème place mondiale, il est sans cesse rattrapé par ses exubérances. Mais cette face sombre ne doit pas écraser les plus beaux aspects de sa personnalité. Marié depuis longtemps à la joueuse professionnelle Flavia Pennetta, il est un père de famille parfait. D’autre part, et paradoxalement à son comportement sur le court, il s’avère être d’une extrême timidité envers des personnes inconnues. Une faiblesse qui permet peut-être d’expliquer son comportement. Arnaud Clément confiait ainsi « qu’il y a un vrai décalage entre le joueur sur le court et l’homme en dehors. En dehors des courts, c’est un mec adorable, hyper doux, tranquille, décontracté. Il est toujours souriant, très accessible. C’est un garçon qu’on aime croiser sur le circuit. ».

Comme lors de notre épisode précédent, on constate que l’homme qui apparaît sur le court ne ressemble parfois en rien à celui qu’il est dans la vie. La faute à l’engagement mental que demande le tennis. Les réponses que donnent les joueurs face à cet engagement sont toutes différentes, et se révèlent parfois destructrices. Ainsi, Fabio Fognini a choisi l’exubérance, au détriment de l’homme sympathique et du père de famille aimant qu’il est dans la vie.